Sieste pour les chameaux |
L’expérience humaine rencontrée
au Wadi Rum fut globalement assez semblable que celle vécue à Petra. En effet,
la plupart des prestations touristiques dans le Sud de la Jordanie sont
assurées par des bédouins. Départ tôt le matin pour prendre le bus jusqu’au
Wadi Rum, avec pour chauffeur un bédouin de Petra parlant trois mots d’anglais
et me demandant par conséquent de faire office d’interprète. Puis arrivée au
Wadi Rum, nous ne payons pas l’entrée parce que c’est vendredi et que je ne
sais pas pour quelle obscure raison, on ne peut pas imprimer les billets le
vendredi. Bref, toujours est-il que le bus nous emmène au village bédouin (le gouvernement
jordanien a en effet regroupé il y a environ 20 ans les bédouins dans des
villages fixes autour des grands sites touristiques), juste devant la maison d’un
guide qui a négocié une sorte de partenariat avec l’hôtel où j’étais à Petra
pour organiser des excursions toutes faites aux clients.
Pour les incultes, le Wadi Rum,
outre le cadre géologique exceptionnel qu’il offre, c’est ça :
Aaaaaaah ! Lawrence d'Arabie !! |
Soit le lieu de tournage de
Lawrence d’Arabie, chef d’œuvre du septième art avec Peter O’Toole et le bel
Omar Sharif et réalisé par David Lean en 1962, récompensé par 7 Oscars bien mérités. Soit l’histoire, inspirée du
livre « Les sept piliers de la sagesse », de l’épopée du
Prince Faysal contre les turcs pendant la première Guerre Mondiale qui se
finira finalement par la défaite du royaume de Damas avec la bataille de
Maysaloun en 1920. Histoire encore d'actualité pour le monde arabe puisqu'elle marque l'échec de l'Union Arabe au début du XX° siècle, mais surtout histoire à donner l'envie à tout orientaliste qui se respecte de traverser des hivers glaçants et des déserts brûlants (les cinéphiles reconnaîtrons la référence) pour aller voir tout ça en vrai.
Sur les dunes de sables rouges |
Le fameux thé des bédouins dont je suis absolument fan ! |
Me voilà donc partie avec sept
autres touristes à la découverte du Wadi Rum, à bord d’une jeep tenant par l'opération du Saint-Esprit et lancée à toute vitesse sur les
pistes de sable rouge. Vue sur la source de Lawrence, les « peintures
rupestres » (ce sont surtout des sculptures, mais l’ignorante que je suis
ne connait pas le terme adapté), la maison de Lawrence (qui a en réalité
plusieurs siècles), le pont de Lawrence, les sept piliers de la sagesse (nommés
ainsi en 1980 en l’honneur de Lawrence et de sa fameuse autobiographie), de
grandes dunes. Certes, le film « Lawrence d’Arabie » a
été tourné là-bas, mais T.E. Lawrence, le vrai cette fois-ci, a réellement
parcouru les environs et basé certaines de ses troupes dans le Wadi Rum.
Outre le fait que le Wadi Rum est
vraiment un site naturel exceptionnel à tout point de vue, que ce soient les
paysages, les fantaisies des évolutions géologiques ou les variations de
couleur du sable, il offre surtout quelque chose de particulièrement rare au
Proche Orient : le silence !!! Pause déjeuné dans le recoin d’une
falaise puis, après s’être baladés l’après midi, arrivée au campement pour voir
le coucher du soleil. L’absence de toute pollution dans le désert rend
absolument époustouflant le spectacle du coucher ou du lever du soleil,
quelques soient les conditions. Le désert prend alors une toute autre forme :
les lumières propres à ce stade de la journée rencontrent les roches ocre des
alentours, créant de somptueux effets d’ombre et de lumière et donnant au
spectateur l’impression que le désert tout entier se prépare résigné à la nuit. D’autres touristes se sont joints
à nous, dont une ribambelle de français insupportables qui habitent Aman,
emportant avec eux la ribambelle de clichés propres aux français en vacances
(jamais contents, plutôt incultes, assez snobs et surtout très imprudents). Dîner
sous la tente de bédouins puis soirée sous le ciel étoilé.
Dur dur de faire la sieste avec un tel panorama |
Jeux avec ce sable magnifique ! |
Pont naturel |
Désert éternel au coucher du soleil |
J’ai là vécu un moment d’anthologie.
J’avais déjà fait l’expérience que parler arabe donne une toute autre
expérience du Proche-Orient et une toute autre expérience avec les gens,
puisque parler l’arabe (avec l’accent local en prime) ne vous place pas comme
un touriste lambda et instaure une relation de confiance inconditionnelle,
surtout avec les bédouins. J’ai fait toute la journée la jalousie des autres
personnes avec qui j’étais, puisque là où eux payaient tout (c'est-à-dire souvenirs
et tasse de thé), on m’offrait tout. Mais je crois que le meilleur moment fut
celui-ci. En effet, le guide me glisse l’air de rien, le plus naturellement du monde, toujours en arabe et
devant tout le monde :
-« Tu bois de l’alcool ?
- Chez les chrétiens, ça pose pas de problèmes…
- Non mais est-ce que toi tu bois de l’alcool ?
- Oh oui, le vin c’est quand même un des piliers de la culture française…
- Très bien, attends un peu, mais avec les autres [bédouins] on a apporté tout ce qu’il faut, donc si tu veux, joins-toi à nous.
- Mais normalement, c’est pas interdit ??
- Si, mais la nuit ça compte pas…»
Bon ben si ça compte pas la nuit
alors …
C’est ainsi que j’ai passé la
soirée, seule au milieu des bédouins, laissant les autres touristes dans les
tentes, à apprendre l’astronomie arabe autour d’un feu, d’un verre d’arak (une
sorte de pastis arabe à base de réglisse), d’un narguilé parfumé à la rose et d’un
thé qui aurait eu l’air tout à fait halal si trois gouttes de vodka n’avaient
pas été malencontreusement versées dedans…
La maison de Lawrence |
La nuit passée, je me réveille au
lever du soleil pour repartir à Damas. On peut avoir beaucoup de préjugés sur
les arabes, notamment sur les relations hommes-femmes, mais toujours est-il qu’avec
un peu de chance, on peut toujours tomber sur des gens tout à fait adorables et
sans aucune arrière pensée. Les arabes ont certes une certaines habilité à
exprimer tous leurs sentiments de façon assez théâtrale, mais en réalité, en tentant
de nouer contact avec eux, il s’avère qu’ils savent peu cacher leurs intentions
et sont tout à fait intègres. On distingue assez vite ceux qui malheureusement
ont des arrières pensées peu recommandables, tout comme on sait assez vite qui
sera honnête et accueillant. Par exemple ce tunisien dans le bus Petra-Aman,
tout content de pouvoir enfin parler français avec un vrai français, ou les
quatre autres personnes avec lesquelles j’étais dans le taxi Aman-Damas, qui n’avaient
jamais rencontré de blondes aux yeux bleus arabisante de leur vie et très
curieux de savoir quels étaient les vrais us et coutumes occidentaux, au-delà d’une
image parfois peu acceptable aux yeux de la culture arabe. Le tout, avec un sens de l'hospitalité que je n'ai jamais vu ailleurs. Ainsi, me voilà
rentrée le soir à Damas, l’esprit rempli de belles images et enthousiaste face
à toutes ces belles rencontres, bien décidée à ne pas laisser telle quelle l’expérience
jordanienne !
aaaaaaaaaaaaaaaaaaah. Ca donne envie...
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